vendredi 20 avril 2007

La bd à Pepe c'est pas de la bd à papa


J’entame avec ce billet sur Pepe Moreno la rubrique « bd placard » qui sera consacrée à des auteurs dont on ne parle plus assez à mon goût.
S’il y a bien une chose dont Pepe Moreno a justement horreur c’est bien le bon goût. Que ce soit par le ton ou les couleurs criardes qu’il emploi, il faut peu de temps pour comprendre qu’il n’est pas là pour caresser le tintinophile dans le sens de la houpette. Il fait de la bd pour se marrer et ce qui l’amuse c’est l’action, le sexe et les têtes qui explosent. Moreno fait partie de ces auteurs incarnant les années 80 par cet esprit provoc’ empreint de culture rock. Avec Rebel (1984) et Joe’s Air Force (1986), il témoigne de sa vision antiraciste d’expatrié espagnol à New-York en créant autour des deux héros une bande en marge et cosmopolite. Ses membres ont aussi un côté cool tombeurs de minettes qui leur donnent des allures de groupes de rock. Le scénario et les dialogues de Rebel, qui se déroule dans un New York ravagé, sont d’ailleurs coécrits par Rob Hingley, un autre expatrié et chanteur du groupe ska The Toasters.
Alors que dans ses deux précédents albums, le méchant était incarné par le nazi ou assimilé, dans Gene Kong (1987) le mal est plus diffus. Moreno y raconte les vicissitudes d'un modeste employé d'un laboratoire dans un New York déshumanisé et ultraviolent. Alors que c’est une fois en dehors de son milieu que King Kong est le plus en danger, Gene Kong l’est avant tout dans sa propre ville. Cette vision de New York doit sans doute beaucoup à son coscénariste, Bob Fingerman, observateur attentif de cette ville avant la politique de « tolerance zero » de Rudolph Giuliani. Gene Kong est le meilleur album de Moreno avec Joe's Air Force.
Enfin, en 1990, Moreno publie Batman : Justice Digitale. S’il peut décevoir à la fois les fans de Batman et ceux de Moreno, il n'en demeure pas moins un album charnière dans son œuvre. Dans cet album réalisé sur ordinateur, Batman combat le Joker au sein d’un ordinateur. Difficile de ne pas voir dans cet ultime album publié à la fin des 80’s ses adieux à la bd en même temps que son entrée dans le milieu des jeux vidéos et des 90’s.
Pour conclure, signalons deux autres albums. Zeppelin, recueil de courtes histoires de science-fiction antérieures mais d’une efficacité redoutable. Et pour les anglophiles Generation Zero chez DC comics et prépublié d’avril 83 à juin 84 dans Epic Illustrated. Le scénario est signé Archie Goodwin dont le nom est familier aux anciens lecteurs de Creepy.
Prix conseillés: se trouvent tous autour de 6 euros. 10 euros maximum en dehors de Generation Zero.

2 commentaires:

Vlad a dit…

Oui... J'aime bien la mise en couleurs au feutre de Moreno, par exemple dans Rebel. Album qui contient un beau World Trade Center en ruines qui sert de repères aux nazis. En fait ce style est tellement emblématique des années 80, qui va finir par être tendance. Faudrait qu'il revienne à la BD mais sans afféterie digitale.
Je me suis souvent demandé si cette histoire de jeux vidéos était pas du pipeau pour dissimuler une retraite. Tu sais sur quels jeux il bossait ?

François a dit…

Je sais que Hell Cab a eu une certaine reconnaissance mais je n'y connais rien en jeux vidéos. De toute façon, c'est difficile de trouver ce genre d'infos car la notion d'auteur dans les jeux vidéos est très nouvelle même si promise à un bel avenir. C'est ce que pense Jodo en tout cas.